3 juillet 2013

La nécro-agriculture US à l'assaut de l'Afrique



Par Benjamin Sourice | blog Mediapart | 1er juillet 2013

Comment les Etats-Unis ont manipulé le Prix de l'alimentation 2013 pour promouvoir les OGM


Le prix mondial de l'alimentation décerné à Monsanto ne cacherait-il pas une opération de propagande plus vaste destinée à séduire les pays du Sud, à commencer par l'Afrique à l'heure où le président Obama visite le continent ?

« Lorsqu'on parle d'agriculture, le Prix mondial de l'alimentation est l'équivalent des oscars », c'est par ces mots que le New York Times annonçait les lauréats 2013 récompensant trois pionniers des biotechnologies. En tête, Robert T. Fraley, vice-président de Monsanto, Mary-Dell Chilton fondatrice du centre de recherche de biotechnologie de Syngenta en 1984 et Marc Van Montagu, chercheur belge, fondateur de Plant Genetic Systems Inc en 1982 et actuel président du lobby de la Fédération européenne des biotechnologies (Europa BIO).

Depuis 1987, ce prix récompense les scientifiques qui contribuent à « améliorer la qualité, la quantité et la disponibilité » de nourriture dans le monde et s'inscrit dans l'héritage de son fondateur, Norman E. Borlaug, père de la « Révolution verte » et prix Nobel de la paix en 1970 pour ses recherches agronomiques. Voici pour la version officielle.

Depuis l'annonce des lauréats le 20 juin, ce prix fait couler beaucoup d'encre. Remis par le Secrétaire d'Etat John Kerry pour lui donner un ultime lustre officiel, ce prix n'a pourtant rien de la respectabilité d'un Nobel avec lequel il essaye vainement de se confondre. Ce prix américain est en réalité lié à la fondation du même nom implantée dans l'Etat agricole et conservateur de l'Iowa, et qui compte parmi ses conseillers d'honneurs les anciens présidents Georges Bush père et Jimmy Carter ou encore A.S. Clausi, vice-président de General Foods Corp (Kraft), leader mondial de l'industrie alimentaire.

Plus édifiant encore est la liste des « sponsors » de cette fondation privée, où se côtoient les fondations Rockfeller et celle de Bill & Melinda Gates deux ardents promoteurs de la « Révolution verte », le géant du matériel agricole John Deere mais aussi Archer Daniels Midland Company et Cargill, les deux leaders mondiaux du commerce de céréales et d'OGM. Pour couronner le tout, dans le top des donateurs se trouvent ni plus ni moins que les deux lauréats de 2013, Syngenta et Monsanto, qui donnait 5 millions de dollars à la fondationen 2008.

Face à l'annonce du prix de l'alimentation 2013, plus de 80 personnalités engagées, anciens récipiendaires du Right Livelihood Award (« Prix Nobel alternatif ») et World Future Council, une fondation caritative internationale, ont fait part de leur « choc », qualifiant la décision de véritable « outrage ». Pour ces leaders altermondialistes, « le choix du World food prize 2013 est un affront fait au consensus international grandissant sur les pratiques agricoles saines et écologiques dont la science à prouver la réelle contribution à l'amélioration de la nutrition et de la soutenabilité de l'agriculture. »

Imposer une Révolution verte en Afrique

Les masques tombés, cette promotion des biotechnologies apparaît dès lors comme une vaste opération de propagande pour imposer dans le monde des OGM pourtant incapable de tenir leurs promesses agronomiques aux Etats-Unis où la technologie s’essouffle. Cependant, ce prix provocateur n'a sans doute pas pour cible les populations hostiles de l'Europe, mais bien plus les populations et décideurs du Sud, en particulier de l'Afrique qui est devenue une priorité dans la politique d’expansion du modèle agricole américain.

Dès septembre 2006, les fondations Rockefeller et Bill & Melinda Gates levaient quelques 150 millions de dollars pour la création de l'Association pour une Révolution Verte en Afrique (Agra) afin de promouvoir l'utilisation d'intrants chimiques, de semences brevetées et d'OGM sur le continent noir. Depuis, les Gates ont investi plus de 400 millions de dollars dans cet organisme de promotion des « agro-dealers » en Afrique (voir l'infographie), mais c'est désormais le gouvernement américain qui prend le relais.

En mai 2012, lors du sommet du G8 à Camp David aux Etats-Unis, le président Obama annonçait le lancement de la New Alliance for Food Security and Nutrition (Alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition) financée par une levée de fonds publics-privés à destination du secteur agricole africain, dans le cadre du programme global Feed the future. Un an plus tard, ce sont 3,75 milliards de dollars de promesses d'investissement qui ont été faites à plusieurs gouvernements africains contre l'engagement de « réformes politiques favorisant un environnement propice aux investissements ».

Lors de sa visite au Sénégal ce 28 juin 2013, le président Obama annonçait aux côtés des dirigeants de l'AGRA, le lancement d'un programme commun avec USAID intitulé Scaling Seeds and Technologies Partnership (partenariat pour l'accroissement des semences et des technologies) portant sur la distribution de semences « améliorées » et l'accès aux intrants chimiques.

Dans ce cadre, l'USAID fait un don de 47 millions de dollars pour les trois ans à venir, tandis que son partenaire, l'AGRA, metra à disposition des paysans de quatre pays africains quelques 50 000 tonnes de semences pour favoriser la création de nouvelles structures de diffusion de ces « technologies capables de changer la donne » selon le communiqué de l'USAID.

Pour les Amis de la Terre international, si l' « on pourrait se réjouir à l'écoute de cette annonce », ce n'est pas la cas car « cette nouvelle alliance ouvre aux multinationales un accès sans précédent aux ressources africaines. Pour obtenir les aides financières, les gouvernements africains doivent engager des changements radicaux pour libéraliser leurs politiques agricoles, semencières et foncières » comme le rapportait le Guardian. L'opération de séduction pourrait donc rapidement tourner à la razzia sur les richesses africaines et la philanthropie affichée du Président Obama pour « son continent » pourrait elle se transformer en une nouvelle mascarade dont l'Histoire porte les secrets.

Voir en ligne:  http://blogs.mediapart.fr/blog/benjamin-sourice/010713/comment-les-etats-unis-ont-manipule-le-prix-de-lalimentation-2013-pour-promouvoir-les-ogm

1 juillet 2013

Après les Grecs, les Crétois et les autres voici les Croates



Comité Valmy | 1er juillet 2013 | par Ahmed Halfaoui

Heureux les Croates qui s’apprêtent à découvrir les joyeusetés du Traité de Lisbonne, bien qu’ils en aient eu un avant-goût, à travers la mise en œuvre des conditionnalités d’adhésion de Bruxelles. Ils avaient voté pour entrer dans l’Union européenne et leur classe dirigeante persiste et signe. Tant pis si Le directeur de la Banque centrale croate, Boris Vujcic, exprime son inquiétude en disant ceci : " il faudra que la zone euro ait réglé ses difficultés, sinon nous aurons de gros problèmes. De ce point de vue, c’est presque un luxe d’être du dehors et de pouvoir observer ". Mais le pied est dans le plat. Déjà, nous pouvons apprendre qu’à partir du 1er juillet, près de 2 000 travailleurs du secteur privé productif vont être licenciés, à cause du fait que les pays clients de leurs patrons (la Bosnie, le Montenegro et la Serbie) vont augmenter leurs droits de douane de 25 et 32 %, en application de la défection de la Croatie de l’espace économique qu’elle constituait avec eux.

Ensuite, l’entrée dans la zone euro prendra 4 ou 5 longues années, au cours desquelles, il s’en passera des choses, dont la couleur est annoncée. Notamment par la prévision de mettre au chômage 10 000 travailleurs du secteur public dans les deux ans à venir et par la multiplication des projets de privatisation, y compris des entreprises stratégiques (transport aérien, chemin de fer) qui subiront le sort des chantiers navals cédés au privé, dont celui de Kraljevica qui a fermé ses portes et celui de Split, qui a mis à la porte 3 000 des 3 200 employés. Alors que la France et l’Italie continuent de déverser des subventions au profit des leurs. Il y aura aussi la mise en œuvre d’une série de mesures qui vont viser à réduire le déficit public afin de " passer durablement sous les 60 % du PIB, ou au moins qu’il reste à ce niveau ".

D’aucuns ne pourront s’empêcher d’invoquer les résultats obtenus dans des pays autrement mieux lotis que la Croatie, qui galèrent de " plan de rigueur " en " rigueur ", s’enfonçant chaque jour un peu plus dans une crise qui n’en finit plus. Et les Croates ont eu le temps de le constater depuis le scrutin en faveur de l’UE. Donc, d’après des enquêtes, la fièvre européenne est retombée. Ils ne seront que 7 % à participer aux festivités organisées pour célébrer l’événement. Un indice sur le désenchantement causé non seulement par les conséquences des " mises à niveau " consenties pour satisfaire aux exigences de l’Union, mais aussi par le triste spectacle offert par la Grèce, l’Espagne, le Portugal, la Crète et même la dégradation de la situation en France, en Italie et en Allemagne. Le 1er juillet la Croatie va devenir le 29ème pays de l’Union européenne. Commencera l’expérience courue d’avance.

Une autre population qui ne va pas tarder à faire la une des actualités télévisées, un autre pays dont les citoyens vont devoir se faire entendre dans la rue pour défendre leur dignité d’êtres humains contre la dictature des banques. Une question de temps, quelques semaines peut-être, sûrement pas une éternité, nous sépare de l’irruption de la contestation.

Par Ahmed Halfaoui

lundi 01 juillet 2013
 

 

blogger templates