Par Le Yéti | Rue 89 | 17 avril 2013
Nouveau : la BCE de Draghi donne pouvoir à la France de battre monnaie
Mais que se passe-t-il ? Voici que notre Mario Draghi, président de
la Banque centrale européenne (BCE), vient en catimini, il y a quelques
jours, de donner à un pays de la zone euro le droit de battre lui-même
monnaie. Et qui plus est de façon quasi « illimitée » (le mot à la mode
pour la finance internationale).
Mais attention, pas à Chypre, pas à la Grèce, pas à l’Espagne, pas au
Portugal, pas à l’Irlande, pas à l’Italie. Non, à la France. A nous
tout seuls ! Et, attention encore, pas dans n’importe quelle monnaie,
pas en francs. Non, en euros sonnants et trébuchants (c’est le cas de le
dire, comme on va le voir).
Certains observateurs avisés y ont (ironiquement) vu un signe plutôt positif. Paul Krugman, prix Nobel (forcément, un prix Nobel !) :
« La France a de nouveau sa propre monnaie. »
Figurez-vous, je ne suis pas prix Nobel (du moins pas encore), mais
je serais presque d’accord avec l’éditorialiste nobelisé du New York
Times : enfin un retour aux monnaies nationales dans l’Union
européenne !
Sauf que, hum, toujours en euros, pas dans tous les pays membres...
Vous seriez aspirant prix Nobel, vous vous demanderiez doctement tout ce
que cela cache, n’est-ce pas ?
Les « économistes » entrent en scène
Eh bien, les Nouvelles économiques allemandes – Deutsche Wirtschafts Nachrichten (DWN) – ont, elles, des idées bien plus vicieuses, bien plus perverses sur la question :« Cette action doit empêcher qu’une banque française ne s’écroule. »Les DWN indiquent qu’une banque française serait particulièrement dans le collimateur, mais sans que son nom soit officiellement indiqué. Les DWN citent trois banques françaises systémiques (BNP Paribas, Société générale, Crédit agricole), avec mention particulière pour le Crédit agricole (qui a terminé l’année 2012 dans le rouge).
Quelques économistes de forums ont au contraire voulu y voir un camouflet... pour « les tenants de la sortie de l’euro » :
« Leur principal argument [celui des europhobes, ndlr] s’effondre : la BCE se comporte comme la BdF [Banque de France] et on peut maintenant jouer sur la monnaie sans qu’en plus cela entraine forcément une dévaluation. »Bon, ok, façon très originale de voir (ces savants tout de même !). Mais donner tout pouvoir monétaire apparent à un pays membre contredit pourtant sérieusement les règlements européens. Et si une institution comme la BCE viole ainsi ses propres prérogatives, c’est qu’il y a forcément anguille tortueuse sous roche.
L’offense du Sud à l’Allemagne
Un petit péril en la demeure à propos de la défaillance prévisible d’une banque française systémique, par exemple ? Une urgence incontinente à agir séance tenante ? Et empêcher en passant l’Allemagne de mettre son nez dans le sauvetage d’un nouveau coq boiteux de cette maudite zone pour laquelle tout irait si magnifiquement bien sans toutes ces fichues emmerdes ?C’est en tout cas ce qu’insinuent méchamment et sans détour nos DWN qui dénoncent un complot (contraint et forcé par leur triste état) des pays éclopés du Sud contre l’impuissante Allemagne :
« Il se développe en France, sous les radars, une gigantesque bulle financière. L’Allemagne doit, impuissante, assister à ce qui se produit. Le chef de la Bundesbank, Jens Weidmann, peut tenir à ce sujet des prêches dominicaux. C’est tout. Cette action montre que la fraction Sud, dans les coulisses de la BCE a déjà largement pris le contrôle sur la structure de l’Europe. »Autrement dit, dans le sauve-qui-peut général, un meurtrier coup de canif vient d’être porté à l’intégrité de la monnaie unique. Mais chut, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes européens unis possible. Et qui diantre ose ici parler de fébrilité et de panique ambiantes ?
0 Comments:
Post a Comment