18 novembre 2013

Un projet de loi met en péril les droits des agriculteurs


Semons la Biodiversité | Cyberacteurs | 18 novembre 2013


La lutte contre la contrefaçon va t-elle nier les droits des agriculteurs ?

Cette loi va condamner tout agriculteur qui produit à la ferme ses semences, ses plants, ses animaux reproducteurs ou ses préparations naturelles à base de micro- organismes ou d'autres éléments naturels issues de sa ferme ou de l'environnement naturel et destinées à ses productions fermières ou aux soins de ses cultures et des ses animaux.


Plus d'infos

Le Sénat doit examiner le 20 novembre 2013 en procédure accélérée une proposition de loi destinée à renforcer la lutte contre les contrefaçons. Cette loi vise à mettre l'État, sa justice et sa police, au service direct des entreprises privées détentrices de Droits de Propriété Intellectuelle (DPI). Tous ces dispositifs renforceraient le contrôle exercé par les détenteurs des marques commerciales, des brevets, y compris les brevets sur les plantes, les animaux et les micro organismes. Ils sont en outre étendus sans restrictions aux Certificats d'Obtention Végétale (COV).. L’acte millénaire de sélectionner et de ressemer une partie de sa récolte sera considéré comme une contrefaçon, c'est à dire sera mis sur le même plan que la reproduction frauduleuse d'un objet ou d’une monnaie.
Sous prétexte de lutter contre les contrefaçons, cette proposition de loi ouvre la porte d'une appropriation généralisée du vivant à un secteur industriel qui n'en est pas à ses premières actions de bio-piratage. Ainsi, cette appropriation ne relèverait pas seulement d'un hold-up légalisé sur des ressources et savoir-faire communs, mais mettrait aussi en péril toutes les formes de biodiversité que seuls de multiples acteurs qui ne s'enferment pas dans des stratégies d'économie d'échelle et de standardisation, sont à même de préserver et de renouveler.

Cette loi, qui s'ajoute à tout un arsenal juridique d'appropriation du vivant, criminalisera les agriculteurs qui ne payeraient pas tous les ans pour acheter ou reproduire eux-mêmes leurs semences et animaux reproducteurs et interdira de facto la sélection paysanne telle qu'elle existe depuis l'invention de l'agriculture. Il en sera de même des paysans-boulangers qui élaborent leurs propres levains pour faire leur pain, des fromagers fermiers qui utilisent leurs propres ferments, des vignerons utilisent leurs levures indigènes ou encore des agriculteurs qui élaborent avec les ressources de leur ferme et de l'environnement naturel d'autres préparations pour soigner leurs cultures ou leurs animaux. En effet, tout agriculteur qui ne disposera pas de factures d'achat de ses semences, de ses animaux reproducteurs ou de ses préparations naturelles sera considéré a priori comme contrefacteur, ce qui est la négation des fondamentaux de l'agriculture... et des libertés individuelles.

Comment ne pas considérer comme inique une loi qui transforme en contrefaçon la production à la ferme par l'agriculteur de ses semences, de ses animaux ou de ses préparations naturelles ? Cet acte fondateur de l'agriculture est un droit immémorial et inaliénable. Il ne saurait être ainsi dévoyé pour satisfaire l'appétit financier d'industriels qui, pour développer leurs produits, ont puisé gratuitement dans l'immense diversité des ressources et savoir-faire développés depuis des générations par les paysans. Ainsi pour l'exemple des semences, ce sont en fait ces semenciers industriels qui devraient être redevables de cette sélection paysanne plurimillénaire qui sert aujourd'hui de base à toute la sélection contemporaine.

Il est donc urgent de se mobiliser et de mettre le législateur devant sa responsabilité d'interdire formellement ce dévoiement de la loi en encadrant avec suffisamment de clarté cette nouvelle proposition législative.

Collectif Semons La Biodiversité – Novembre 2013 - http://www.semonslabiodiversite.com/  

Les implications concrètes de cette proposition de loi sont développées dans la suite de l'argumentaire.

Le collectif Semons la Biodiversité et ses partenaires défendront auprès des parlementaires l'amendement suivant afin d'éviter que la lutte conte la contrefaçon n'ait comme conséquence de transformer l'agriculteur en délinquant.

Proposition d'amendement à l'attention des sénateurs français :
  • « La production à la ferme par un agriculteur de ses semences, de ses plants ou de ses animaux pour les besoins de son exploitation agricole, ne constitue pas une contrefaçon, et ce quelle que soit l'origine de ces semences, de ces plants ou de ces animaux.
  • La production à la ferme par un agriculteur de ses ferments, levains, levures et autres préparations naturelles à base de micro-organismes ou d'autres éléments naturels issus de sa ferme ou de l'environnement naturel et destinés à ses productions fermières ou aux soins de ses cultures ou de ses animaux, ne constitue pas une contrefaçon.
  • La rémunération de la sélection des végétaux et des animaux destinée à l'alimentation et à l'agriculture fait l'objet de dispositifs particuliers qui ne rentrent pas dans le champ d'application des lois générales de lutte contre les contrefaçons ».

La dénonciation des débordements abusifs de cette proposition de loi contre les contrefaçons s'inscrit dans une campagne plus large pour que « vivent les semences paysannes ». Dans ce contexte, elle s'articule avec un autre combat concernant le projet de loi autorisant la ratification de l’accord relatif à une juridiction unifiée du brevet, que le gouvernement a examiné le 23 octobre et qui doit être voté par le Parlement avant la fin 2013. Cet accord instaure un nouveau tribunal international des brevets qui échappera au contrôle parlementaire, tout comme l'Office européen des Brevets qui accorde des brevets sur des gènes ou caractères naturellement présents dans les plantes et les animaux en opposition totale à la résolution du Parlement européen du 10 mai 2012. Ce tribunal pourrait poursuivre en contrefaçon tout agriculteur victime de la présence fortuite d'un gène ou d'un caractère brevetés dans ses récoltes ou ses animaux. En effet, alors que l'accord international a pris soin de protéger les sélectionneurs victimes d'une telle présence fortuite, il ne prévoit rien pour la protection des agriculteurs qui ne pourraient fournir la facture d'achat de semences ou d'animaux brevetés.

Il faut agir maintenant pour informer les sénateurs avant le vote du 20 novembre ! Chacun doit porter ce combat à la connaissance de son sénateur et de son député.
http://www.semonslabiodiversite.com/wp-content/uploads/2013-11-12-Argumentaire-contre-loi-Contrefaçon-Collectif-Semons-la-Biodiversité.pdf 

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