Sous couvert de resserrer les règles autorisant les salariés à travailler plus de 48 heures par semaine, les États membres de l’Union européenne, à cause notamment du changement d’attitude de la France avec l’arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy, viennent de porter un nouveau coup à l’encadrement de la durée du travail dans l’Union. Attac condamne cet accord, qui constituerait une grave régression si le Parlement européen l’entérinait.
La directive 93-104 du 23 novembre 1993 permettait au Royaume-Uni de déroger à la durée du travail fixée dans l’UE à 48 heures hebdomadaires. Une clause de la directive prévoyait de réexaminer cette dérogation en 2003. Depuis cette date, le Royaume-Uni bloquait toute discussion concernant ce sujet, mais le soutien discret de la délégation française aura eu raison d’un consensus assez général souhaitant supprimer du texte la notion d’opting out, qui ouvre la possibilité de travailler au-delà de cette limite.
C’est en fait le contraire qui a été décidé le 9 juin par le Conseil des ministres chargés du travail : le maintien et la consolidation de la dérogation offerte aux employés de travailler « s’ils le veulent » jusqu’à 60, voire 65 heures par semaine à titre individuel, plafond qui pourra encore être dépassé dans le cadre de conventions collectives d’entreprises.
Par ailleurs, la notion de « durée du travail » a été revue dans un sens restrictif, avec la définition de « périodes de garde inactives » qui ne pourront plus être considérées comme temps de travail.
Cette dernière mesure doit être considérée avec attention. Deux arrêts de la Cour de justice des Communautés européennes stipulaient que le temps de garde doit être intégralement calculé comme temps de travail, et les personnels hospitaliers particulièrement, soumis à des dépassement d’horaires fréquents et répétitifs au rythme des interventions médicales, s’appuyaient sur ce droit pour en obtenir compensation. La nouvelle définition les priverait de cette possibilité.
D’autres dispositions dangereuses sont prévues : l’une, qui était au départ positive, prévoit dès le premier jour de travail un même traitement entre intérimaires et employés permanents, sauf si les partenaires sociaux concluent un accord national sur un « délai de grâce » supérieur, ce qui est le cas au Royaume-Uni. Une autre entend augmenter la durée pendant laquelle est calculée la moyenne de 48 heures hebdomadaires.
Le gouvernement Fillon prétend que les dispositions dérogatoires demandées par le Royaume-Uni, mais acceptées et applicables dans toute l’Union, n’influenceront pas la politique française sur le droit du travail. Pourtant, les projets proposés par le ministre Xavier Bertrand prévoient que des accords dérogatoires puissent remettre en cause au cas par cas les majorations d’heures supplémentaires et les durées maximales de travail, un opt out à la française qui entre parfaitement dans le cadre du compromis du 9 juin.
Si ce compromis était validé par le Parlement européen, car il s’agit d’un sujet entrant dans le cadre de la codécision, et ce à l'encontre de la volonté des organisations syndicales dont la CES, ces remises en cause, dans un contexte de marché du travail de plus en plus déréglementé, pèseraient gravement sur la réduction du temps de travail, l'hygiène et la sécurité, droits auxquels les salariés sont particulièrement attachés.
Attac France,
Montreuil, le 11 juin 2008
source: http://www.france.attac.org/spip.php?article8659
13 juin 2008
L’accord européen sur le temps de travail n’est pas un « compromis », c’est une régression
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