Pas la peine, qui de ricaner, qui de se désespérer : la chance est extrêmement minime, je le sais. Et alors ? Dans l’isoloir, l’électeur est seul face à ses responsabilités. C’est à lui de voir. Pour moi, c’est tout vu.
Lors des législatives, la contrainte dégénérescente du vote utile se fait moins pressante. Les sondages ont moins de prise sur l’émotion populaire. On vote pour un de nos 577 représentants parlementaires. Chaque citoyen a tout loisir d’imposer ses volontés à son élu.
On notera que lors des différentes mandatures de la Ve République, c’est le parlement et non le président qui détermina in fine l’orientation gouvernementale (cf. les trois cas de cohabitation française en 1986, 1993 et 1997).


Des objectifs incontournables


Il n’y a pas trente-six manières de sortir notre pays du marasme. Juste répondre aux priorités les plus urgentes, s’attaquer franchement aux racines du mal. Là encore plusieurs objectifs me semblent devoir être remplies, incontournables.
1. Garantir un minimum vital décent à tous les citoyens travaillant ou non. Aujourd’hui, ce n’est pas l’augmentation du Smic qui est prépondérant pour une grande partie de nos concitoyens frappés par la précarité et le chômage, mais simplement la survie. Pour tous ceux-là, le Smic n’est plus un salaire minimum, mais presque un pauvre idéal à atteindre.

2. Mettre sous tutelle le système financier, coupable de tous les déboires actuels. En même temps, réfléchir et anticiper le nouvel ordre monétaire sain qui tôt ou tard s’imposera au monde entier.

3. Geler immédiatement la dette du pays. La dette, devenue monstruosité incontrôlable et surtout irremboursable, s’en trouve de fait injustifiable. A cause d’elle, des pays tombent comme des mouches : Grèce, Irlande, Espagne, Portugal, Italie, mais aussi la glorieuse Amérique dont on vient apprendre qu’elle a dû s’endetter en douce de 7 700 milliards de dollars (la moitié de son PIB !) pour sauver ses banques, sans même passer par l’autorisation du Congrès. La dette n’est qu’une arme oppressive aux mains de la mafia financière. Désarmons celle-ci avant quelle ne nous tue.

4. Remettre l’économie réelle en ordre de marche et au service de tous. Non dans une perspective de croissance meurtrière ou de plein-emploi obsolète, mais dans le cadre d’une gestion écologique des ressources, du partage des vraies richesses et de la satisfaction des besoins de chaque citoyen. Où la production privée régulée et les services publics de base se complèteront dans l’intérêt général.

Rompre avec la fatalité du désastre


La prochaine mandature devra tendre vers ces objectifs vitaux, sauf à précipiter le pays dans un marasme général meurtrier.

Aujourd’hui, le Front de gauche me paraît le plus en mesure d’y influer, même s’il est encore trop encombré par les vieilles lunes d’antan : productivisme, mirage du plein-emploi retrouvé, chimère de la croissance comme seul moteur de l’économie…

La bataille de la présidentielle n’a pas été gagnée. Quel que soit le résultat au soir du 6 mai, même si l’un des candidats offre des manières plus rondes que l’autre, nous nous dirigerons tout droit vers le désastre économique, la dissolution sociale et pour finir le déshonneur politique.

Élire une chambre qui enregistrerait passivement le déclin n’a aucun sens. Les élections législatives offrent une chance infime mais réelle de rompre dans la dignité avec la fatalité du désastre.